Pour un club de vélo, le confinement, c’est la fin de nos activités et de nos projets. , Plus de sorties de groupe en matinée. Plus de BRM ou de cyclos sur les traces des grandes classiques belges au printemps. Annulation de la participation à la cyclomontagnarde des Vosges, prévue début juillet et qui devait rassembler une dizaine de cyclanthropes.

En attendant la possibilité de reprise, qui risque d’être individuelle dans une premier temps, le confinement est donc l’occasion de revenir sur le Paris-Brest-Paris 2019, qui a été achevé avec succès par deux cyclanthropes, David et Yohan. C’est avec le récit de Yohan que nous démarrons ce premier article de rétrospective, plutôt écrit, les photos étant plutôt du côté de David.

Bonne lecture à vous, et au plaisir de se retrouver prochainement sur le vélo !

 

Le Paris-Brest-Paris 2019 de Yohan

Voilà, après un peu plus de six mois de préparation et quelques BRM mémorables (un 200 venteux à Mouscron, un 600 magnifique dans les Ardennes belges et au Luxembourg), le grand moment est venu : celui de participer à Paris-Brest-Paris (PBP pour les intimes) !

Mais comment se représenter 1219 kilomètres à effectuer dans un délai de 90h ? Je n’ai pas réussi à le faire dans le train de banlieue m’amenant au point de départ à Rambouillet. Le PBP démarre d’ailleurs la veille du départ, avec le contrôle des vélos (mes lampes vont-elles fonctionner ?) et le retrait du matériel officiel : plaque de cadre, gilet, bidon,… La pluie battante sur Paris et sa banlieue ce samedi ne rend guère optimiste, mais les prévisions météo sont bonnes, croisons les doigts.

Après un dimanche matin pluvieux donc, le ciel s’ouvre partir de 14h. Après, c’est la fin des préparatifs, la vérification ultime que les sacoches contiennent tout ce qu’il est prévu d’emmener. Pas trop bien sûr, mais de quoi affronter la nuit, le froid du petit matin dans la forêt bretonne,… Dans le train de banlieue, les concurrents montent à chaque station, des japonnais, des russes, des français. A la sortie de la gare de Rambouillet, deux surprises : je retrouve de manière impromptue David, l’autre Cyclanthrope engagé, et je crève dès la sortie de la gare (ce sera la seule avarie du parcours, hormis un rayon cassé sur la roue avant qui n’a pas eu d’incidence sur la suite).

Le départ rend fébrile, tous les cyclistes sont impatients d’en découdre avec ce parcours, la nuit, la fatigue. Et à 20h, c’est parti pour l’aventure !

Ce que je retiendrai de ce périple, c’est tout d’abord l’ambiance. Celle entre cyclistes, parfois très conviviale, comme lors de ces deux heures le dernier après-midi où dans un groupe composé de bric et de broc au fil du parcours, j’entendais parler anglais, français, allemand. Beaucoup de concurrents seuls aussi, qui luttent comme ils peuvent contre les kilomètres et s’accrochent aux roues. C’est d’ailleurs un phénomène assez surprenant : peu de volontaires pour prendre des relais, et il m’est arrivé, à l’occasion d’emmener un peloton de 30 à 40 cyclistes sans m’en rendre compte ! Et puis des concurrents qui viennent de partout : j’ai eu la plaisir de rouler avec des ukrainiens, des anglais de Bristol, des américains, italiens, japonais,… Beaucoup d’asiatiques d’ailleurs, dont des indiens pas toujours très bien équipés, ce qui m’a fortement surpris !

Ambiance aussi et surtout sur le parcours avec la présence de stands ouverts toute la nuit dans certains villages, ce qui permet de se sustenter à n’importe quelle heure ! Je garde un souvenir ému de la galette saucisse dévorée à trois heures du matin dans un village entre Tinténiac et Becherelle ! Certains n’hésitent pas à tenir devant chez eux des stands avec café, ravitaillement en eau et en aliments sucrés, jusque tard dans la nuit. C’est réconfortant de trouver un café au milieu de la nuit, en plein Centre Bretagne, quand il fait très frais (la température est descendue jusqu’à 5 degrés), et d’échanger quelques mots avec ces habitués qui ne rateraient le passage de PBP sous aucun prétexte. Un souvenir de l’arrivée à Loudéac à l’aller, le lundi vers 18h30, après les 445 km du premier jour, où toutes les personnes présentes félicitent, applaudissent ! Le sommet a été atteint à Villaine-la-Juhel, sur le retour, après donc 1 000 km : l’arrivée vers 15h30 a eu lieu dans un ambiance de stade avec une foule impressionnante assistant à l’arrivée des concurrents, les encourageant, applaudissant là aussi ! Une vraie dose d’énergie pour repartir !

L’autre grand moment est bien sûr le passage à Brest, avec la traversée de la rade sous le soleil (bon, quelques gouttes sont tout de même tombées, histoire de ne pas faire mentir la légende !). Cette deuxième journée, entre Loudéac et Loudéac, via Carhaix et Brest, a d’ailleurs été formidable : la traversée de la forêt de Huelgoat dans les brumes du petit matin, la montée du Roc Trévézel au petit matin, la vue sur la lande des monts d’Arrée, les arrêts à Sizun,… J’ai adoré ce passage du parcours !

Heureusement, les jambes et la tête ont répondu présent pour affronter cette épreuve. Pourtant, le premier soir, je n’en menais pas large : un petit malaise en faisant la queue pour le repas (sans gravité) et des irritations déjà prononcées au fessier n’auguraient rien de bon. Mais le repas, la nuit puis la crème magique transmise par mon père m’ont permis de remonter en selle sans trop de douleur et de mener à bien ce périple.

J’ai pris beaucoup de plaisir à effectuer cette randonnée en compagnie de mon père, Thiéry (2e PBP), et de son cousin Frédéric (5e PBP), du club de Boeschèpe. Manquait malheureusement mon frère Gaëtan, qui n’a pas pu prendre le départ suite à une blessure récente à un genou. Le niveau sur le vélo était homogène, ne mettant personne en difficulté, et j’ai pu profiter de leur expérience de ce genre d’épreuve au long cours, moi qui n’avait qu’un seul 600 km auparavant dans les jambes. Comme prévu, il faut gérer les moments de moins bien (très peu nombreux pour moi, tant mieux, quelques heures entre Fougères et Villaines-la-Juhel au retour) et de mieux sans euphorie (même s’il est parfois difficile de se retenir dans certaines ascensions !).

Car si PBP est impressionnant par sa distance, c’est aussi une véritable épreuve étant donné son dénivelé. Presque aucun passage de plat, toujours des montées ou des descentes plus ou moins prononcées, avec des ascensions qui ne sont jamais longues, mais peuvent être pentues comme en Centre Bretagne. Ce parcours usant, éprouvant, est vraiment un périmètre à prendre en compte dans la préparation !

Je suis donc ravi de cette expérience, qui n’a pas été une expérience des limites. Les trois nuits de sommeil, si elles ont été courtes (3h30 à 4h) ont permis de rester lucide et de profiter du parcours. La fin de l’épreuve rappelle à quel point le corps a été éprouvé, mais quelques nuits de sommeil ont permis de se remettre sans trop de difficultés. C’est vraiment une épreuve à découvrir, pour ceux qui ont un attrait pour la longue distance ou l’endurance. Est-ce que je referai ? Le jour même de l’arrivée, j’aurai dit non. Quelques mois après, la réponse est beaucoup moins définitive…